Réglementaire

Les dispositifs de sécurité après Courrières – Épisode 2

Dans les années 1900, en France, tout le monde pensait qu’il n’était pas possible qu’une explosion de poussière se produise (À part peut-être les mineurs eux-mêmes !). Mais à la suite de l’explosion de Courrières, chacun prend encore un peu plus la mesure des dangers explosifs de la mine, sous le vent de mouvements sociaux et de nouveaux dispositifs de sécurité.

 

 

 

L’amorçage des dispositifs de sécurité

Au début des années 1900, en France, l’idée qu’une explosion de poussière de charbon puisse se produire était largement ignorée. Beaucoup pensaient que le charbon, en raison de sa forme, n’était pas assez poussiéreux pour poser un réel danger. Pendant ce temps, des pays voisins comme la Belgique ou l’Angleterre reconnaissaient déjà la poussière de charbon comme une menace sérieuse dans les mines. Était-ce un manque d’information ou un choix délibéré pour répondre aux besoins énormes de charbon de l’industrie en pleine expansion ?

Lampe de sûreté – Source Wikipedia – Photo libre de droits

Ce qui est certain, c’est que l’explosion de Courrières en 1906 a changé les perspectives. Elle a poussé les acteurs à mieux comprendre les dangers liés aux poussières de charbon. Les anciennes théories ont été abandonnées, et le risque explosif des poussières est alors devenu une priorité majeure.

Comme souvent dans l’histoire, c’est à la suite d’un grave accident que des décisions majeures sont prises. Après cette catastrophe, des réglementations strictes de sécurité et de prévention sont mises en place. Les ingénieurs se lancent alors dans l’étude de nouvelles méthodes pour protéger les mineurs et sécuriser les mines. Parmi celles-ci, des dispositifs d’arrosage sont testés pour réduire la quantité de poussière de charbon, diminuant ainsi le risque d’explosion. D’autres études se penchent sur les systèmes de ventilation pour évacuer la poussière accumulée, un autre facteur de risque.

Des changements concrets commencent à se voir. Les lampes à feu nu, utilisées jusque-là, sont remplacées par des lampes de sécurité dites « à laminage », qui étouffent la flamme avant qu’elle ne devienne dangereuse. Ce simple ajustement réduit considérablement les accidents liés aux explosions. Un autre grand progrès concerne les outils utilisés dans les mines. À l’époque, aucun matériel anti-étincelant n’existait. Les mineurs utilisaient des équipements susceptibles de produire des étincelles, augmentant ainsi le risque d’explosion. Des outillages en bronze béryllium, qui ne génèrent pas d’étincelles, sont alors développés pour offrir une plus grande sécurité dans les zones sensibles.

 

La prise de conscience et les changements après Courrières

Après la catastrophe de Courrières, les compagnies minières et les mineurs réalisent l’importance d’instaurer des mesures de sécurité plus rigoureuses. Au départ, une personne interne à l’entreprise est désignée pour vérifier la mise en place de ces mesures. Cependant, ce manque d’objectivité conduit rapidement à la nécessité d’un regard externe. C’est ainsi qu’est née l’idée de l’Inspection du Travail.

La catastrophe, combinée aux grèves de 1906 et 1907, pousse le gouvernement à agir. Il crée alors le Ministère du Travail, regroupant plusieurs directions jusqu’alors liées au Ministère du Commerce et à celui de l’Intérieur. Une des premières actions notables de ce nouveau ministère est la loi de 1907, qui donne aux femmes mariées le droit de disposer de leur propre salaire. Avant cela, seul l’époux avait ce droit, un problème d’autant plus grave pour les nombreuses veuves après l’accident de Courrières.

Jeanne Elizabeth Schmahl (1846–1916) – Sources Wikipedia – Image libre de droits

Jeanne Elizabeth Schmahl (1846–1916) – Sources Wikipedia – Image libre de droits

Ce progrès social est le résultat de longues luttes menées par des militantes comme Jeanne Schmahl, première femme docteure en droit, qui a créé un groupe pour défendre ce droit. Sa proposition, soutenue par des féministes et portée au Sénat en 1906, a finalement permis aux femmes de mieux contrôler leur propre argent.

En parallèle, les ingénieurs, les mineurs et le nouveau Ministère du Travail collaborent pour élaborer des solutions préventives afin de réduire les risques dans les mines. C’est à cette époque qu’apparaissent les premières stations d’essais, comme celle de Liévin, pour étudier les phénomènes d’explosion et former des sauveteurs spécialisés.

 

Les débuts de la recherche expérimentale

En 1907, ces stations d’essais marquent les premiers pas vers une recherche approfondie sur les atmosphères explosives. Elles permettent de mieux comprendre les mécanismes des explosions de poussière et de développer des dispositifs de sécurité plus efficaces.

Dans le prochain épisode de notre série, nous vous raconterons l’histoire fascinante de ces recherches pionnières et leur impact sur la sécurité dans les environnements industriels à risque.

 

À suivre…

Relire l’épisode 1 « Catastrophe de Courrières – prémices de la maîtrise du risque d’explosion »