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Après Courrières, les débuts de la recherche expérimentale sur les poussières explosives

Après la catastrophe de Courrières et la mise en place de mesures plus strictes en matière de sécurité pour les mineurs, des stations d’essais dédiées à la recherche expérimentale sur les poussières explosives voient le jour.

 

La station d’essais de Liévin

L’un des principaux enseignements tirés de l’accident de Courrières a été le manque criant de recherches sur les explosions liées aux poussières. Pour combler cette lacune, la première station d’essais, dédiée à l’étude de la propagation des poussières de charbon et à la sécurité dans les mines, fut inaugurée en 1907 à Liévin, dans le Pas-de-Calais.

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La station de Liévin était extrêmement bien équipée pour son époque et nourrissait de grandes ambitions en matière de recherche. Elle disposait, entre autres, d’une galerie de 300 mètres reproduisant les conditions souterraines des mines, d’un laboratoire de chimie et de pyrotechnie, ainsi que d’une galerie spécialement dédiée à l’étude des explosifs. Elle fut la première station à bénéficier de moyens aussi avancés, avec des dispositifs capables de mesurer la pression et la vitesse de propagation des flammes, par exemple.

C’est également au sein de cette station qu’a été créé le premier poste de secours en collaboration avec 19 compagnies minières du Nord-Pas-de-Calais. Ce poste regroupait les sauveteurs formés à intervenir dans toute la région, ainsi que les futurs sauveteurs en formation.

La station de Liévin fut la première à réaliser des essais à grande échelle sur l’inflammabilité des poussières de charbon. Au cours de sept années de recherche, plus de mille explosions y furent réalisées. Ces expériences ont permis de confirmer l’inflammabilité des poussières, un fait largement contesté à l’époque. La station a également contribué à mieux comprendre les conditions favorisant les explosions, comme les différences de composition du charbon ou l’humidité de l’air. Elle a permis de faire des recommandations essentielles, telles que l’arrosage des mines, la mise en place de « barrages pare-poussière » et l’utilisation de grisoumètres.

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En 1914, les recherches furent brutalement interrompues par le déclenchement de la Première Guerre mondiale. La station fut détruite, et la main-d’œuvre, principalement mobilisée pour l’effort de guerre, n’était plus disponible pour poursuivre les travaux. Les recherches minières cessèrent, et les femmes et enfants furent mobilisés pour remplacer les hommes partis au front.

Les investigations menées à la station de Liévin sous la direction de l’ingénieur Taffanel reçurent une reconnaissance internationale, autant pour la qualité des recherches que pour les résultats obtenus.

La station d’essais de Montluçon

Après Courrières - Série histoire de l'ATEX - A2SE ConseilAprès la Première Guerre mondiale, les recherches reprirent, car malgré les progrès réalisés grâce aux travaux de Taffanel à Liévin, la sécurité dans les mines restait insuffisante. Certaines explosions demeuraient encore inexpliquées. C’est ainsi qu’en 1921, la station d’essais de Montluçon fut inaugurée pour poursuivre et approfondir les recherches entamées à Liévin.

Le site de Montluçon, encore plus sophistiqué que celui de Liévin, comprenait des laboratoires, des ateliers de préparation de combustibles, et une galerie de 150 mètres pour simuler les conditions minières. Dirigée par Audibert, la station de Montluçon s’ouvrit aux collaborations internationales pour accélérer les avancées en matière de prévention des risques explosifs et de sécurité. Audibert organisa en 1931 la première « Conférence internationale des Directeurs de Stations d’Essais sur la sécurité dans les mines », qui se tiendra tous les deux ans. Il initia également des conférences de trois jours destinées aux ingénieurs, rassemblant jusqu’à 150 participants.

La station de Montluçon poursuivit ses recherches jusqu’en 1947, malgré une destruction partielle en 1943 pendant la Seconde Guerre mondiale. Cette même année, le CERCHAR (Centre d’études et de recherches des charbonnages de France), ancêtre de l’INERIS, fut créé, marquant un tournant dans l’étude et la prévention des risques dans les mines.

La suite au prochain épisode…

Sources : Philippe Cassini, Jean-François Raffoux, Christian Tauziède. L’héritage de Courrières : de la sécurité minière à la sécurité industrielle.. 10 mars 1906 : la catastrohpe des mines de Courrières.. et après ?, 2007, Lewarde, France. pp.179-188. ineris-00140515